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“Plotinus and Parmenides”

 

In 1939, F.M. Cornford published his Plato and Parmenides. In the course of this influential commentary on the dialogue, Cornford takes a few pages to heap scorn on what he calls “the Neoplatonic interpretation” of the hypotheses of the second part of the dialogue.  In part owing to this dismissal, and no doubt in part owing to many others who have followed Cornford in their work on Parmenides, interpretations of the “exercise,”  especially in the English-speaking world, have not been fruitful.  Even among those who see in the second part of the dialogue a positive contribution to the solution to the problems raised in the first part of the dialogue, it is supposed that the superposition of a One above Being is irrelevant to that contribution. In this paper, I hope to show that (1) there is an entire “family” of interpretations of Parmenides that can be labeled “Neoplatonic,” but that Plotinus’ interpretation stands out for its insights; (2) this interpretation of the dialogue has its roots in the Old Academy, especially in the works of Aristotle and Speusippus; (3) on philosophical grounds, Plotinus has the best understanding of the “moral” of the second part of the dialogue.

 

Regarding (1), I focus on the differences between the interpretation of Plotinus and that of Proclus, the latter of which comes, as Proclus tells us, from his esteemed teacher Syrianus.  The key difference between the two is that Plotinus sees how to incorporate Aristotle’s concept of ἐνέργεια into the account of the first principle of all.  This enables Plotinus to answer the crucial question of how the “transcendent” One can have any causal relevance to the cosmos. This is something that Proclus does not quite see. Further, Plotinus applies the Aristotelian concept of ἐνέργεια to the One, understood to be equivalent to the Good, and articulates its causal activity in terms of his doctrine of the two ἐνέργειαι. The attributes denied of the One in the first hypothesis are not an impediment to identifying that One with the Good in Republic about which quite a lot can be said, including its causal relevance to the cosmos. The concept of ἐνέργεια is crucial to the comprehensive systematization of the Platonic insights. Without it, the relevance of the One of the first hypothesis is obscured or lost.

 

Regarding (2), I want to summarize and extend the work of Dodds, Miller, and Halfwassen in order to show that there is no innovation in Plotinus’ interpretation. There is nothing “neo” in his Platonism.  Both Aristotle and Speusippus (according to Proclus’ recording of his view) assume that the One of the first hypothesis of Parmenides is identical with the superordinate Good of Republic and elsewhere. They also assume that the One of the second hypothesis is not identical with the One of the first, but is a One-Many, identical with One-Being as referenced in Sophist. The Indefinite Dyad or Great-and-Small is found here. Finally, we see that the One of the third hypothesis is a “One and Many,” anything governed by Soul and therefore in time and capable of change.  Following Aristotle, I argue that the second part of Parmenides is a “logical” exercise regarding the meaning of “one,”  exactly in the sense in which Aristotle himself speaks “logically” about being in the fourth chapter of the seventh book of Metaphysics.

 

Regarding (3), I will show the cogency of the identification of the Idea of the Good and the One of the first hypothesis of Parmenides. This will require showing (a) how Plato views the achievement of goodness as the integrative unity of that which strives for the Good and (b) that the necessary absolute simplicity of the first principle of all entails the complexity of Being, such that the meaning of “one” in the first hypothesis must be different from the meaning of “one” in the second hypothesis and the meaning of “one” in the third. The “others” refer to whatever does or does not participate in “one” according to each of the three senses. The “logical” exercise regarding these “ones” then enables the reader or student to solve the problems for Forms that Parmenides raises in the first part of the dialogue. It does this by showing that the “one-over-many” that the Form is, is not absolutely one as is the One of the first hypothesis. Nor is the “one” that is one instance of or participant in any Form. The relation between Forms and sensibles or between that which is purely intelligible and that which is qualifiedly intelligible or unintelligible must be seen as contextualized within the larger framework of the three hypostases, One, Intellect, and Soul.

 

Plotin et le Parménide

FM Cornford publie en 1939 son livre Platon et Parménide. Au sein de cet important commentaire sur le dialogue, Cornford prend quelques pages pour exprimer son dédain sur ce qu’il appelle «l’interprétation néoplatonicienne» des hypothèses de la deuxième partie du dialogue. En partie à cause de ce rejet, et sans doute aussi suite à beaucoup d’autres qui ont suivi Cornford dans leur lecture du Parménide, les interprétations de «l’exercice», en particulier dans le monde anglo-saxon, n’ont pas été fructueuses. Même parmi ceux qui voient dans la seconde partie du dialogue une contribution positive à la solution des problèmes soulevés dans la première partie du dialogue, on suppose généralement que la superposition d’un «Un au-dessus de l’Être» est sans rapport avec cette contribution. Dans cet article, j’espère montrer que (1) il y a toute une «famille» d’interprétations de Parménide qui peuvent être qualifiées de «néoplatoniciennes», mais que l’interprétation de Plotin s’en distingue; (2) cette interprétation du dialogue a ses racines dans l’ancienne Académie, en particulier dans les œuvres d’Aristote et de Speusippe; (3) Sur le plan philosophique, Plotin est celui qui comprend le mieux la «morale» de la seconde partie du dialogue .

 

En ce qui concerne (1), je me concentre sur les différences entre l’interprétation de Plotin et celle de Proclus, dont cette dernière vient, comme nous le dit Proclus, de son estimé professeur Syrianus. La principale différence entre les deux est que Plotin comprend comment incorporer le concept aristotélicien d’ἐνέργεια dans le premier principe du tout. Cela permet à Plotin de répondre à la question cruciale de savoir comment le «transcendant» peut avoir une quelconque relation de cause à effet avec le cosmos. Cet enjeu, Proclus ne le comprend pas vraiment. En outre, Plotin applique le concept aristotélicien d’ἐνέργεια à l’Un, compris comme équivalent au Bien, et articule son activité causale à travers sa doctrine des deux ἐνέργειαι. Les attributs qu’on nie à l’Un dans la première hypothèse ne sont pas un obstacle à l’identification de l’Un avec le Bien dans la République à propos duquel on peut en dire beaucoup, y compris sur sa pertinence causale pour le cosmos. Le concept d’ἐνέργεια est crucial pour la systématisation complète des idées platoniciennes. Sans elle, la pertinence de la première hypothèse s’obscurcit ou se perd.

 

En ce qui concerne (2), je souhaite résumer et étendre le travail de Dodds, Miller et Halfwassen afin de montrer qu’il n’y a pas d’innovation dans l’interprétation de Plotin. Il n’y a rien de «néo» dans son platonisme. Aristote et Speusippe (d’après l’enregistrement de Proclus) supposent que la première hypothèse de Parménide est identique à celle du Bien suprême de la République et d’autres dialogues. Ils supposent également que l’Un de la seconde hypothèse n’est pas identique à la première, mais est un l’Un-plusieurs, identique à l’Un-Être tel qu’il apparaît dans le Sophiste. On trouve ici la dyade indéfinie, ou le grand et le petit. Enfin, nous voyons que l’une des trois hypothèses est un «un et plusieurs», tout ce qui est régi par l’âme et donc dans le temps et capable de changer. Après Aristote, je soutiens que la deuxième partie de Parménide est un exercice «logique» concernant la signification de «un», exactement dans le sens où Aristote lui-même parle «logiquement» de l’être au chapitre quatre du septième livre de Métaphysique.

 

En ce qui concerne (3), je montrerai le bien-fondé de l’identification de l’idée du bien et de celle de la première hypothèse de Parménide . Il sera nécessaire de montrer (a) comment Platon considère l’accomplissement du bien comme l’unité intégrative de ce qui vise le Bien et (b) que la simplicité absolument nécessaire du premier principe implique la complexité du désir, de sorte que le  sens de «un» dans la première hypothèse doit être différent du sens de «un» dans la deuxième hypothèse et du sens de «un» dans la troisième . Les «autres» se rapportent à tout ce qui participe ou non à «un» selon les trois sens. L’exercice «logique» concernant ces «uns» permet ensuite au lecteur ou à l’étudiant de résoudre les problèmes des formules que Parmenide soulève dans la première partie du dialogue. Cela se fait en montrant que le «un-au-dessus-du multiple» que la forme est, n’est pas absolument un, tout comme l’un des première hypothèse. Le «un» n’est pas non plus une instance ou un participant de quelque forme que ce soit. La relation entre les formes et les sensibles ou entre ce qui est purement intelligible et ce qui est intelligible ou inintelligible doit être considérée comme contextualisée dans le cadre plus large des trois hypostases, l’Un, l’Intellect et l’Âme.

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